17 mai 2022

Le Golem : sommes-nous des ordinateurs mal programmés?

Wiener, le père fondateur de la cybernétique, après avoir œuvré à son avènement, s’est profondément inquiété du mauvais usage que les hommes pourraient en faire. Rappelons que cette discipline voit le jour pendant la deuxième guerre mondiale. Wiener voit la bombe atomique détruire Hiroshima et Nagasaki. Il en est profondément affecté. Son cauchemar est de voir la bombe confiée à une machine cybernétique. Une machine à laquelle les hommes auraient délégué leur pouvoir de décision.
 
Il écrivit un petit livre peu connu, intitulé « le Golem ». Selon la légende, le Golem est une créature façonnée dans l’argile par le rabbin de Prague. Par une formule magique, le Rabbin lui insuffla la vie.  Son Golem était un être imparfait : dépourvu de parole, de morale et de libre arbitre, il était asservi à son créateur. Le Rabbin lui ordonna de venir en aide au peuple, soumis à des persécutions et à des travaux pénibles. Dans un premier temps, le Golem s’acquitta brillamment de sa mission, mais bientôt il échappa au contrôle du Rabbin et se mit à massacrer ceux-là même qu’il était censé protéger. 

La métaphore est limpide. Mais tandis que Wiener, vêtu de la robe du sage, cherchait une solution du côté des valeurs morales (appelant à mettre la cybernétique au service du bien), Bateson lui, questionnait les fondamentaux de notre pensée. Selon lui, nombre des prémisses qui sous-tendent notre modèle culturel sont non seulement fausses, mais aussi mortifères. Parmi ces prémisses erronées citons la perception de notre être au monde. Nous nous percevons comme des organismes séparés de notre environnement, lequel nous semble nous appartenir. Il s’agit là d’une erreur de niveau logique aux conséquences gigantesques. Car c’est l’inverse : nous appartenons à l’environnement. Nous appartenons à un système d’une dimension incommensurable et d’une complexité inouïe. Tout comme quelque chose n’allait pas dans la formule magique du rabbin, quelque chose ne va pas dans notre relation au monde. Nous agissons comme des ordinateurs mal programmés.

Nous avons célébré la lutte de l’homme contre la nature, nous avons cru que le progrès technologique permettrait une amélioration constante de nos conditions de vie, mieux : une amélioration de l’homme lui-même. Nous nous rendons compte maintenant que nous scions avec une belle ardeur la branche sur laquelle nous sommes assis.  La métaphore de Bateson à ce sujet est à la fois proche et différente de celle de Wiener : il nous parle du dieu Eco. Celui-ci n’est pas une création de l’homme, mais à l’image du Golem, il est dépourvu de parole et d’éthique. C’est un Dieu sans intention, un Dieu cybernétique : si nous rejetons trop de CO2 dans notre atmosphère, il répond par le réchauffement par le climatique. Rien d’intentionnel, simple feedback de sa part. Le dieu Eco est un dieu dont on ne se moque pas. 

Nous ferions bien d’en tenir compte si nous voulons survivre. Il est grand temps de corriger nos erreurs épistémologiques, de revoir les fondements mêmes de notre pensée et de notre rapport au monde. Comme le disait Bateson il y a bien longtemps déjà : notre tâche la plus urgente est d’apprendre à penser autrement.  

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